Avec le multi-saxophoniste zurichois Christoph Grab, nous avons non seulement affaire à un remarquable soliste au passé déjà chevronné mais également à un compositeur arrangeur-chef d'orchestre superactif et inspiré.

En tandem avec le guitariste berlinois Frank Möbus qui a joué et tourné avec le gotha du jazz contemporain, il a créé un groupe à l'instrumentation particulière: anches, guitare électrique, accordéon, tuba/trombone et section rythmique basse-batterie qui permet une grande plasticité de phrasés et de timbres.

Raw Vision produit une musique dynamique, raconteuse d'histoires qui ne néglige pas la puissance expressive du rythme. Les structures polyrythmiques qui émaillent les pièces ne sont pas seulement des passages obligés des compositions, elles font partie des bases des improvisations, ce qui a contribué à souder le groupe.

Christoph Grab maîtrise l'art de l'orchestration, il fait preuve d'un sens du voicing qui fonde un son d'orchestre qui n'est pas sans parenté, bien que l'architecture des compositions soit totalement différente, avec celui des orchestrations de l'âge d'or de la West Coast, que l'on songe à celles de Marty Paich, Bill Holman ou Shorty Rodgers.

Dans son jeu de saxophoniste, Christoph Grab combine un goût pour la mélodie avec une certaine raucité d'un son très «bluesy». Le tandem rythmique de grande classe constitué par le bassiste Silvan Jeger et le batteur Maxime Paratte fait souvent cause commune avec le guitariste Frank Möbus pour créer des nappes de musique, pleines de fraîcheur avec beaucoup d'espace libre pour que les solistes puissent se raconter, ce dont profite entre autres l'excellent tromboniste Bernhard Bamert.

Dans l'architecture du jeu d'ensemble, les références aux formes traditionnelles du jazz sont totalement négligées. Christoph Grab a su définir un nouveau terrain de jeu totalement inédit.
Bel orchestre et belle musique par une brochette de talents jamais entendus sous nos latitudes. A ne pas manquer!